Construire la souveraineté européenne pour relever ensemble les défis de la mondialisation.

La SAVOIE dans sa dimension spacio-temporelle soit par son Histoire et par sa géographie est au cœur de l’EUROPE ;

LA FRANCE a co-construit l’EUROPE donc je défenderai contre les vents et marées populistes l’EUROPE , plus d’EUROPE mais aussi MIEUX D’EUROPE .

C’est souvent comme cela que commencent et s’arrêtent les projets des mouvements politiques pro-européens au moment des élections européennes. Bien souvent, malheureusement, l’apport idéologique de ces pro-européens se limite à des positions défensives pour tenter de contenir les ravages du discours nationaliste démagogue qui se propage d’autant plus facilement qu’il s’appuie sur des caricatures. Difficile alors de faire triompher la pensée pro-européenne lors du scrutin sans apporter d’idées fraiches et quand il faut dix minutes pour réfuter par A plus B un argument fallacieux énoncé en quelques secondes.

Pour avoir sa place dans le débat, il faut imposer des thèmes, avancer des idées, proposer des solutions. Dire que sans l’Europe ce serait pire et qu’elle nous évite la guerre ne peut plus suffire pour convaincre le citoyen de lui accorder sa confiance.

Face à la mondialisation, à la métropolisation, à l’explosion du numérique et à l’avènement d’une société de l’instantané, le citoyen peut légitiment se sentir désarmé, se sentir seul face à un système sur lequel il n’a aucune influence. Dans ce contexte, le repli sur soi est un réflexe naturel, un instinct de survie. C’est là-dessus que jouent les nationalistes qui promettent aux peuples qu’en se repliant sur eux-mêmes et en fermant leurs frontières ils retrouveront leur souveraineté.

La souveraineté, c’est bien là l’enjeu. Pour le citoyen comme pour l’Etat. Comme les citoyens, les Etats ont peur d’apparaître plus faibles en abandonnant des compétences régaliennes à l’Union européenne et c’est pour cela que les Etats sont bien souvent les premiers à freiner les avancées dans l’intégration européenne.
Las, ces positions défensives sont contreproductives et ne font qu’accélérer la perte d’influence de l’Europe dans le monde et donc celle de la France. Pour retrouver de l’influence, du pouvoir, de l’importance dans le monde globalisé, il faut être une puissance économique, militaire, diplomatique à l’échelle des autres grandes puissances. Pour être une puissance souveraine à l’échelle des Etats-Unis ou de la Chine, il faut être une entité politique intégrée capable de rivaliser dans tous les domaines, de la défense au numérique en passant par l’énergie ou le spatial.

La construction européenne qui s’est imposée pour préserver la paix sur un continent ravagé, s’impose maintenant pour permettre à ce continent de conserver sa place dans le monde, de préserver et de promouvoir ses valeurs. Il ne faut pas s’arcbouter sur des règles datant de la construction de la CECA, il faut inventer de nouvelles règles du vivre-ensemble européen.

Nous sommes à la croisée des chemins. Rien n’est encore irrécupérable mais nous nous sommes laissé distancer dans bien des domaines par nombre d’autres grandes puissances.

S’il y a un secteur dans lequel, malheureusement, nous sommes quasiment toujours les seuls premiers, c’est celui des valeurs démocratiques, de la protection des droits fondamentaux de l’ensemble de nos concitoyens. Il n’y a plus d’autre continent dans le monde qui garantisse un niveau de droits homogène et stable.
Dans ce contexte, les enjeux sont clairs, rétablir notre souveraineté dans tous les secteurs stratégiques pour préserver notre modèle de valeurs et de droits. Les solutions sont, pour la plupart, connues et passent par une plus grande intégration européenne. Attention, connues ne veut pas dire non plus simples à mettre en place !
Cela ne veut pas non plus dire augmenter sans limite les compétences et le périmètre d’intervention de l’Union européenne. S’il faudra renforcer son rôle dans les secteurs touchant à ce qu’on appelle en France, le Régalien, il faudra que l’Union européenne sache limiter son intervention à la définition des grands axes, du cap à suivre par les Etats membres et les collectivités locales dans la plupart des autres secteurs.
Les collectivités locales sont essentielles à la réalisation de notre projet européen car elles font le lien avec nos concitoyens.

Elles connaissent leurs quotidiens, leurs défis et elles sont souvent plus à même que l’Union européenne et que les Etats de mettre en place des solutions adaptées à leurs administrés.
A l’échelle de l’Union européenne comme de la plus petite collectivité qui la compose, pour construire cette Europe souveraine et garante de nos droits, il faudra des dirigeants courageux et audacieux soutenus par des parlementaires européens qui auront reçu un mandat clair des citoyens d’Europe

Dans ce manifeste, à travers quelques thématiques qui me semblent essentielles, j’ai voulu faire ressortir les grandes lignes que je défendrai en tant que Sénateur :

1 – Faire respecter nos valeurs et garantir les mêmes droits à tous les citoyens européens

Ce qui caractérise l’Union européenne et qui en fait un espace si unique au monde, ce sont bien les valeurs communes à tous, les droits et libertés appartenant à chaque citoyen européen. Plus aucun continent sauf le nôtre n’échappe aux fléaux des dictatures, des guerres et à leurs conséquences dramatiques pour leurs populations qui parfois, viennent se réfugier à nos portes.

C’est dans ces valeurs que se trouve l’âme de notre projet européen, la source de la citoyenneté européenne.

Paix, laïcité, droits de l’Homme, démocratie : toutes ces valeurs qui sont les fondements de notre société européenne sont bien souvent maltraitées :
– quotidiennement, à l’extérieur de l’Union européenne, et c’est pour cela que nous devons avoir une diplomatie et une défense à la hauteur des menaces potentielles ;
– trop fréquemment à l’intérieur de l’Union européenne et c’est pour cela que nous devons être intransigeants avec tous les Etats membres et se donner les moyens de sanctionner tout manquement qu’il soit du fait d’un individu ou d’un Etat.

La liberté de conscience pour chacun et la laïcité de notre système politique sont des repères pour les habitants du monde entier et nous devons ne supporter aucune attaque contre ces principes car la moindre brèche permettrait à toutes les haines et à tous les fanatismes de s’y engouffrer.

Pouvoir vivre librement et pleinement son orientation religieuse, sexuelle ou politique est une force de notre société européenne mais entre ceux qui voudraient parfois la limiter au nom de valeurs rétrogrades et ceux qui voudraient purement et simplement l’interdire au nom d’idéologies dévoyées, la liberté est en danger. La laïcité telle que défendue par le Parti Radical depuis sa création peut être une alliée qui vienne au secours de la liberté car la laïcité permet la liberté.

L’égalité en dignité et en droit de tous les êtres humains est le combat de notre temps.
Aujourd’hui encore, à l’heure d’internet et des réseaux sociaux, des millions de femmes et de filles n’ont accès ni à l’éducation, ni à la santé, ni à l’emploi.
Par ailleurs, on sait qu’une femme sur trois sera victime de violences physiques à un moment de sa vie, de la part d’un proche, conjoint ou compagnon.
Il nous appartient donc de bâtir une Europe protectrice pour chacun et chacune d’entre nous, en facilitant le droit à la formation pour tous, à la sécurité sous toutes ses formes, à l’accès à la culture, meilleur rempart contre la barbarie.
Nous proposons notamment un Droit à l’IVG européen pour toutes les femmes, harmoniser les délais légaux et instaurer son remboursement intégral pour toutes les femmes.
Chez les Radicaux comme à l’Alliance des Libéraux et des Démocrates Européens, garantir la liberté à nos concitoyens, dans ce qu’ils vivent et ce qu’ils entreprennent, est la raison d’être et le moteur de notre engagement politique.

2 – Redevenir une puissance diplomatique et militaire

Avec la mise en place d’un Haut Représentant de l’Union pour les Affaires Etrangères et la politique de Sécurité, l’Union européenne a fait un premier pas vers une démocratie commune. Néanmoins, la tradition diplomatique des Etats et leur maillage très fin d’ambassades et de consulats constituent autant une richesse qu’une force d’inertie très lourde qui fait revendiquer à chacun la volonté de son indépendance diplomatique. Dans la pratique, les résultats individuels n’existent quasiment plus et la cacophonie de nos expressions nationales abime la crédibilité de nos efforts et rendent inutiles les moyens humains et financiers déployés.

Pour retrouver de la voix, les Etats membres doivent accepter de ne plus parler que d’une seule, celle du Haut Représentant qui deviendrait alors un véritable ministre des affaires étrangères de l’Union européenne.

Dans chaque pays du monde, au lieu de conserver des dizaines d’ambassades et de consulats, nous devrions mutualiser les moyens pour que tous soient dans un même lieu et sous la responsabilité d’un diplomate européen directement nommé par le ministre des affaires étrangères de l’UE.
Ainsi renforcée, notre diplomatie devrait pouvoir s’exprimer pleinement au sein des Nations Unies et un siège au Conseil de Sécurité de l’ONU devrait être créé pour l’Union européenne.
Également pour permettre à notre diplomatie de retrouver de sa superbe et pour assurer la sécurité de nos concitoyens, il est essentiel de se doter d’une armée européenne qui seule pourra nous garantir une autonomie stratégique et opérationnelle.

Bien sûr, il ne s’agit pas de faire disparaître des siècles de traditions militaires en un claquement de doigts, ni même de remettre en cause notre appartenance à l’OTAN. La construction d’une armée européenne sera un processus de longue haleine mais il importe que l’objectif final soit partagé par tous.
Dans le domaine des moyens matériels, dans un premier temps, il s’agira de mutualiser les efforts de recherche dans l’industrie de l’armement puis de se rendre complètement indépendant en n’utilisant que des systèmes européens de défense et de télécommunication. Pour les moyens humains, il faudra tout d’abord renforcer les coopérations et intégrer petit à petit les commandements.

A court terme, l’Union européenne devra se doter d’une force armée projetable très rapidement pour le maintien de la paix. L’engagement de cette force devra être autorisé par le Parlement européen.

La dissuasion nucléaire doit également être un outil communautaire. Nous devons créer un bouclier nucléaire européen sous commandement européen.
On entend parfois dire qu’une armée européenne est illusoire parce qu’on ne peut envoyer des hommes mourir pour l’Union européenne. Cette assertion est ridicule. Le militaire s’engage pour défendre des valeurs, des droits et des libertés. Le soldat européen défendra ces valeurs, ces droits et ces libertés que l’Union européenne est la seule puissance continentale à protéger.
Si le programme Erasmus donne aux jeunes un fort sentiment européen et change la vie de tous ceux qui en font l’expérience, alors transposons-le aux militaires.

Mettons en place un Erasmus d’un an dans la formation de tous les nouveaux militaires et laissons également la possibilité ouverte à ceux qui sont déjà militaires de carrière depuis bien longtemps.

3 – Ne pas subir les migrations et imaginer de nouvelles solidarités Europe/Afrique

L’instabilité politique qui règne dans nombre de pays et notamment sur le continent africain ainsi que les conséquences du dérèglement climatique rendront les migrations encore plus nombreuses dans l’avenir. Etant entendu que l’Union européenne ne peut accueillir dans de bonnes conditions tous ceux qui souhaiteraient quitter leur pays, il faut mettre en place une politique migratoire commune à l’UE et dont tous les membres s’engagent solidairement à respecter les règles.

Cela passe par une législation communautaire du droit d’asile, un pacte d’intégration des réfugiés mais aussi par un contrôle strict de nos frontières extérieures et une immigration économique bien encadrée par des critères communs. Les déboutés du droit d’asile ainsi que toutes les personnes en situation irrégulière devront quitter le territoire communautaire.
S’il faudra montrer de la fermeté face aux passeurs mafieux qui exploitent la détresse humaine, il faudra également mieux utiliser l’aide au développement que nous apportons aux pays d’origine ou aux pays de transit frontaliers de l’UE.
Une très grande fermeté doit également être appliquée à l’encontre des entreprises qui emploient des travailleurs en situation irrégulière. Ils sont un maillon de la chaîne des passeurs qui promettent de meilleures conditions de vie et un travail aux candidats à la migration.
De même, si nous avons des systèmes sociaux très protecteurs en Europe, il convient d’en permettre l’accès de manière très progressive à ceux que nous accueillons avec l’obtention de droits complets uniquement s’ils accèdent à la citoyenneté.

L’agence Frontex doit être renforcée et doit avoir le pouvoir de déployer ses propres garde-frontières et garde-côtes pour assister un Etat membre qui ferait face à un afflux important de demandeurs d’asile et de migrants à l’une de ses frontières terrestre ou maritime.

Garantir des frontières extérieures imperméables et connaitre l’identité de tous les individus présents sur le territoire européen est essentiel afin de pouvoir conserver une circulation totalement libre à l’intérieur de ces frontières. La libre circulation est l’un des fondements de la construction européenne et ne doit jamais être restreinte ou remise en cause.

Concernant nos relations avec l’Afrique, il conviendra de s’attaquer courageusement aux racines de la crise migratoire sans aucun tabou.
Il faudra repenser totalement l’aide au développement afin de changer à la fois de modèle mais aussi et surtout d’échelle.
De nombreuses améliorations sont possibles dans le domaine de l’économie et du développement durable comme par exemple en faisant la promotion de l’agro écologie ou en modulant les compensations de taxe carbone et des programmes de reboisement ou d’électrification propre localisés dans des zones ciblées (petits territoires, régions prioritaires comme le Sahel).

4. Garantir la sécurité de nos concitoyens

Pour permettre une libre circulation à l’intérieur des frontières européennes, il faut pouvoir garantir la sécurité de nos concitoyens à l’intérieur de cet espace et cela passe par une meilleure intégration de nos systèmes policiers et judiciaires.

Europol doit progressivement devenir une police européenne ayant le pouvoir d’arrêter et de détenir les individus ainsi que le pouvoir d’investigation sur l’ensemble du territoire communautaire.

La lutte contre le terrorisme doit être également une priorité européenne avec une coordination et une intégration des services qui doit aller du renseignement jusqu’au parquet européen.
A ce titre, le parquet européen, créé l’an dernier pour agir en matière de lutte contre les infractions aux intérêts financiers de l’Union européenne, doit voir ses compétences étendues à la lutte contre la criminalité organisée internationale et le terrorisme.

Pour le renseignement, qu’il soit intérieur ou extérieur, il est grand temps d’avoir des services secrets européens capables d’assister nos forces de police, nos armées et notre diplomatie.

Dans le domaine de la protection civile, il conviendra de mutualiser les forces avec l’amélioration du dispositif RESCUE qui a déjà eu l’occasion de faire ses preuves et de montrer à quel point la solidarité européenne est primordiale dans les situations d’urgence.

5. Répondre au défi environnemental

Enrayer le changement climatique et répondre au défi environnemental ne peut se réduire à des conventions internationales incantatoires et à la mise en place d’une fiscalité punitive plus souvent utilisée pour combler les déficits des Etats membres que pour mener de vraies politiques publiques environnementales.
Faire le choix de politiques publiques européennes ambitieuses doit se traduire par une intégration européenne plus grande dans les secteurs des transports et de l’énergie et par l’adoption d’une logique de filières industrielles européennes fortes et conquérantes dans ces domaines où nous sommes les seuls à faire respecter des normes industrielles environnementales contraignantes à nos entreprises. Pour s’assurer de ce respect et améliorer nos capacités de contrôle, il conviendra d’ailleurs de renforcer les attributions et pouvoirs de l’Agence Européenne de l’Environnement.

Ces politiques publiques ambitieuses doivent être mises en place en relation étroite avec les villes et métropoles qui concentrent à la fois les habitants mais également les difficultés liées à cette densité de population comme la saturation des infrastructures de mobilité (congestion) et les conséquences dramatiques que cela pose en termes de climat ou de santé publique (particules fines). Les villes doivent porter la transition écologique en étant accompagnées techniquement et financièrement par l’Union européenne.

Dans le domaine des transports, cela signifie développer les infrastructures de transports massifiés (ferroviaire, fluvial, maritime) pour le transport de passagers comme dans le fret, tout en ayant des règles d’émissions ambitieuses et surtout rigoureusement contrôlées. Il ne faut pas bannir voitures et camions qui restent bien souvent le seul moyen d’acheminer personnes et marchandises mais mettre des moyens importants dans le déploiement d’infrastructures de rechargement en carburants alternatifs comme l’hydrogène ou dans la recherche sur des véhicules électriques dont les batteries auraient une meilleure autonomie et surtout, des composants plus écologiques qui ne seraient pas des ressources rares à l’échelle mondiale et totalement absentes en Europe.

Dans le domaine de l’énergie, il est temps de réaliser l’Union de l’énergie dont on parle depuis bien longtemps. Aujourd’hui, nous en avons un besoin impératif afin de répondre à nos besoins de sécurité d’approvisionnement mais aussi pour coordonner une politique de mix énergétique à l’échelle de l’Union. Une meilleure coordination permettra de sortir des énergies carbonées en s’appuyant sur les atouts et les ressources naturelles de chaque Etat membre dans les énergies renouvelables ou dans le nucléaire.

C’est également le domaine agricole qui devra continuer d’évoluer pour préserver la biodiversité, permettre aux agriculteurs d’exercer leur profession dans des conditions décentes, aux citoyens de consommer des produits de qualité dans des conditions de sécurité sanitaire optimales et à l’Union européenne d’être indépendante et autosuffisante pour ses approvisionnements.

La future Politique Agricole Commune (PAC) doit conduire à une transition vers un modèle agricole européen durable et performant. Les paiements directs aux agriculteurs doivent être revus en tenant moins compte du critère de taille des surfaces et plus des critères d’ordre géographique ainsi que des critères de performance environnementale et de qualité.

Un fonds agricole européen, mobilisable en cas de crise, devrait pouvoir réduire les volumes de production afin d’assurer la stabilité des prix des matières premières sur le marché européen.

6. Construire un espace stratégique, innovant et compétitif

Entre les productions industrielles chinoises et les productions technologiques américaines, coréennes ou japonaises, l’Union européenne cherche parfois sa place dans la nouvelle économie mondiale. Pourtant elle dispose d’atouts incontestables dans de nombreux domaines et demeure le marché le plus dynamique du monde. Dans l’industrie, c’est 52 millions d’Européens qui œuvrent chaque jour au maintien de notre souveraineté économique. Sans industrie européenne, il ne faut pas se faire d’illusions sur notre capacité à répondre au défi environnemental. Si nos entreprises, respectueuses du cap que nous voulons fixer en matière d’environnement, disparaissent, alors nous ne serons plus en capacité d’imposer quelque norme que ce soit à des entreprises étrangères qui n’auront plus de concurrence européenne sur notre propre marché.

Permettre la constitution de champions européens ne doit pas être vu uniquement à travers le prisme de la concurrence interne au marché européen mais aussi et surtout à travers celui du marché mondial. Dans certains domaines industriels stratégiques comme l’industrie ferroviaire, la constitution de grands groupes est la seule chance de maintenir une industrie européenne dans ces domaines où une concurrence pas toujours loyale monte en puissance.
Pour conserver notre souveraineté économique dans l’avenir, il s’agit d’avoir une vision stratégique et de se doter des moyens de la mettre en place. Moyens en termes de recherche et d’innovation mais aussi en termes juridiques et fiscaux afin de ne pas permettre une concurrence déséquilibrée entre nos industriels européens respectueux de nos normes ainsi que de nos valeurs et certains de leurs compétiteurs subventionnés par leurs Etats ou ne respectant pas des règles minimales en matière d’environnement ou de Droits de l’Homme. C’est tout un écosystème qui doit être coordonné au niveau européen pour permettre de faire émerger ou de préserver des entreprises européennes compétitives, innovantes qui sauront rivaliser avec leurs concurrents mondiaux.

Le libre-échange a toujours été l’un des piliers de la construction européenne mais il ne doit pas pouvoir être envisagé comme un sens-unique. La réciprocité doit être une condition sine qua non de tous nos échanges. Il ne doit plus être concevable qu’une entreprise étrangère vienne vendre ses produits sur notre marché alors que ses concurrents européens n’ont pas le droit d’aller vendre leurs produits sur le sien.

C’est dans le domaine du numérique que nous aurons probablement les défis les plus difficiles à relever car pour garantir notre souveraineté, nous avons absolument besoin d’une Europe du numérique qui soit à la hauteur des enjeux et capable de répondre aux dangers encourus par nos systèmes économiques, politiques et sociétaux. L’ensemble de nos données doivent être protégées pour garantir le respect de la vie privée de nos concitoyens mais aussi pour prévenir un usage dévoyé de ces données conduisant à la déstabilisation de nos démocraties.

7. Bâtir une société harmonieuse

L’une des valeurs essentielles de l’Union européenne a toujours été la solidarité. Cette solidarité est parfois mise à mal par des systèmes nationaux trop divergents qui maintiennent une hétérogénéité sociale trop importante au sein de l’UE.

La convergence fiscale et sociale est devenue une condition sine qua non de l’avenir de la construction européenne. Sans elle, pas de sentiment d’appartenance à un même ensemble politique.

Dans le domaine social, il faut imposer la convergence de nos systèmes en allant vers le mieux-disant social pour protéger nos concitoyens et retrouver cette solidarité qui est à la base du projet européen : construisons le solidarisme européen.

Dans le domaine fiscal, il est primordial de conserver une relation de confiance entre la puissance publique et le contribuable. Dans tous les Etats, le consentement à l’impôt recule et les citoyens ne peuvent plus supporter le dumping fiscal et social qui met en concurrence les travailleurs européens sur d’autres critères que la seule qualité de leur travail. Dans chaque Etat membre, il faudra remettre à plat la fiscalité et créer un serpent fiscal européen. Concrètement cela veut dire fixer un seuil maximum et un seuil minimum entre lesquels l’écart se réduira progressivement chaque année, une convergence totale de nos systèmes serait ainsi réalisable en quelques années.

Parmi les outils intégrateurs aussi symboliques qu’efficaces, nous devrions mettre en place un contrat de travail européen unique applicable à tous les types de salariat et dans tous les Etats membres.

Dans une Union européenne avec des droits sociaux harmonisés, un droit du travail harmonisé et un contrat de travail unique, rien ne s’opposera plus à la création d’un « pôle emploi européen » pour fluidifier le marché du travail à l’échelle de l’Union et qui offrira de nouvelles opportunités aux demandeurs d’emploi.

Bien sûr, pour avoir un marché de l’emploi qui soit véritablement européen, il faut améliorer l’enseignement des langues dans l’éducation nationale mais aussi favoriser la mobilité de tous les enfants et leur donner une véritable éducation civique européenne afin que le franchissement d’une frontière interne ne soit plus vu comme un risque ou un danger mais comme une opportunité et un enrichissement personnel.

Concernant la formation, c’est tout au long de la vie qu’il faudra s’en préoccuper et en y intégrant une vision plus prospective des évolutions en cours avec l’avènement d’une société toujours plus numérique et dans laquelle l’intelligence artificielle va prendre de plus en plus de place. S’il faut préparer les enfants en les orientant vers des métiers qui ne disparaitront pas quand ils ne seront qu’à l’aube de leur vie professionnelle, il faut également être capable d’accompagner et de former les adultes qui ont déjà un emploi dont les modes d’exercices vont  être profondément transformés, ou bien qui risque de purement et simplement disparaitre.
Outil initialement destiné à aider les territoires à s’adapter aux mutations de l’économie, les fonds structurels ou fonds régionaux ne remplissent plus correctement ce rôle. Ces fonds européens qui ont permis la mutation de certains de nos territoires comme ceux touchés par le déclin industriel du charbon ou du textile, peinent aujourd’hui à accompagner les mutations en cours dans notre société et dans nos économies et ne peuvent se préoccuper de préparer demain. Parce que la solidarité ne doit pas s’entendre qu’entre citoyens européens mais aussi entre les Etats et surtout entre les territoires, il faudra réformer les fonds structurels de manière à conserver l’esprit de solidarité qui est à la base de leur création mais en modifiant profondément leur fonctionnement, encore trop bureaucratique et leurs objectifs, encore trop souvent déconnectés des besoins des territoires et de leurs habitants. Ces fonds doivent être facilement mobilisables et avoir une utilisation définie par le territoire, pour le territoire. Il ne doit plus être question de « tordre » des projets pour qu’ils rentrent dans une case administrative de financement européen, peu importe si cette torsion dénature le projet, le rend inopérant ou constitue une perte d’argent public.

Qui dit société harmonieuse, dit sentiment d’appartenance, citoyenneté, et il faudra renforcer toutes les initiatives en faveur de la citoyenneté européenne. Il existe déjà un certain nombre de symboles, dont l’Euro, qui fait partie des plus célèbres, mais les symboles sont importants parce qu’ils aident à mettre des mots sur ce qu’est la citoyenneté européenne, sur ce que cela signifie de tous vivre ensemble ; pourquoi ne pas en créer de nouveaux comme une carte d’identité européenne ou une équipe européenne lors des Jeux Olympiques ?

8. Réformer nos institutions

C’est la clef de ce projet. La plupart des objectifs et des priorités développés demanderont une révision des Traités.

Cette révision ne doit pas être une fin en soi mais bien un outil pour permettre de réaliser des objectifs communs. Aujourd’hui, tout le monde s’accorde à dire que les traités ne sont pas modifiables car les peuples européens s’opposeraient à toute étape intégratrice supplémentaire. C’est probablement vrai si cette révision ressemble à un empilement de mesures techniques sans afficher le but politique de cette réforme. Dans son périmètre actuel, l’UE n’a plus les armes pour lutter et permettre à ses Etats membres de conserver leur souveraineté. Confrontés à un choix très simple entre se recroqueviller et disparaître de la scène internationale ou se rassembler pour lutter ensemble entre pays et citoyens partageant les mêmes valeurs, la même histoire, la même culture, l’UE doit pouvoir se réformer suffisamment pour rester un acteur mondial de premier rang.

• Modifier la gouvernance de l’Union européenne

Réforme aussi symbolique que nécessaire pour que l’UE ait une légitimité populaire, il est primordial que le Président de l’Union européenne soit élu au suffrage universel direct.
Pour garantir une prise de décision plus rapide et éviter les paralysies liées aux égoïsmes nationaux, la règle de l’unanimité doit disparaître et être remplacée par des règles de majorité plus ou moins qualifiée selon l’importance stratégiques des sujets.
Egalement pour permettre plus de souplesse et éviter les blocages, il faut un système de coordinations renforcées plus souple et plus rapide à mettre en œuvre afin de permettre à quelques Etats qui souhaiteraient avancer plus vite sur un sujet de commencer à quelques-uns pour montrer la voie et être ensuite rejoints par les autres.
Plus de pouvoirs pour l’UE implique nécessairement de renforcer le contrôle de l’exercice de ces nouvelles responsabilités et pour cela il faudra renforcer les pouvoirs du Parlement européen.
Ses pouvoirs doivent notamment être renforcés vis-à-vis de la Commission européenne. Cela passe par l’élection du président de la Commission européenne par le Parlement européen ainsi que par une capacité, pour lui, de contrôler les décisions de la Commission. Pour ce qui est du rééquilibrage vis-à-vis du Conseil, cela devra se traduire dans le domaine budgétaire par un pouvoir égal que ce soit pour la fixation des recettes ou celle des dépenses.
Afin de mieux pouvoir retranscrire les aspirations des citoyens européens dont les parlementaires sont les représentants, il convient de doter enfin le Parlement européen d’un pouvoir d’initiative législative.

• Adapter les compétences à chaque échelon de pouvoir

Notre projet européen est ambitieux. Il l’est pour l’Union européenne qui devra prendre de nouvelles compétences pour répondre aux attentes de nos concitoyens. Il doit également l’être pour les Etats et pour les Collectivités territoriales. En effet, si l’on accroit les responsabilités régaliennes de l’UE, il est nécessaire de l’alléger de toute une foule de sujets qui seraient mieux traités à un échelon plus local. Dans sa manière de légiférer, l’Union européenne doit fixer les grands axes, être garante d’un haut niveau d’harmonisation mais doit laisser aux Etats membres et à leurs collectivités locales le pouvoir de définir la manière dont cela se traduira d’une manière détaillée à l’échelle territoriale la plus pertinente.
C’est surtout les collectivités locales qui doivent prendre une part plus grande dans le travail législatif européen. Les collectivités locales sont au cœur du projet européen. Elles constituent l’âme de l’Europe. Bien plus que de ses 27 pays, l’Europe est constituée de ses régions avec toute la richesse que représente leur diversité. Donner plus de responsabilités aux collectivités locales, c’est donner plus de pouvoir à nos concitoyens qui peuvent influer plus facilement sur ces structures plus proches des réalités de leur quotidien.
Cela se traduit d’une part, très directement par l’application sur leur territoire d’un cap fixé par l’UE en ayant la capacité d’y apporter des nuances adaptées à la situation locale et d’autre part, dès l’élaboration de ce cap, en ayant un rôle renforcé dans le processus législatif européen. Pour ce dernier point, il faudra renforcer les moyens et les pouvoirs du Comité des Régions de l’Union européenne afin d’en faire un véritable organe représentant politiquement les collectivités locales européennes. Pour le faire sans impacter le budget des institutions européennes, le Comité des Régions pourrait utiliser les moyens actuellement alloués au Comité Economique et Social Européen dont la légitimité et l’utilité déclinent.

• Se donner les moyens de nos ambitions

Doter l’Union européenne de ressources propres est évidemment l’un des premiers leviers à actionner pour en faire une véritable puissance capable de mener des politiques publiques ambitieuses sans dépendre des agendas politiques des différents Etats membres.
Ces ressources propres peuvent être d’origines diverses (pourcentage de TVA, taxe carbone, taxe sur les transactions financières, …) mais ne doivent surtout pas venir en sus des fiscalités nationales. Un Euro de plus au budget européen doit être un Euro de moins perçu par les Etats membres. Dans les domaines stratégiques et régaliens, dépenser au niveau européen permet de dépenser moins en mutualisant les frais mais aussi et surtout de dépenser mieux en apportant une valeur ajoutée européenne à chaque projet.